2.
[5] Une fois que la suite du raisonnement aura ainsi amené l'adversaire à confesser la substance éternelle du Verbe divin, force lui sera bien de convenir que la substance du Verbe est douée de vie. Il serait impie, en effet, d'attribuer au Verbe une substance inanimée à la façon des pierres. S'il est une substance pensante et incorporelle, il possède absolument la vie ; s'il est dépourvu de vie, il est aussi absolument dépourvu de substance. Mais précisément, on a montré l'impiété d'une conception qui donnerait le Verbe comme dépourvu de substance. On a donc, du même coup, démontré en bonne logique que le Verbe dont il est question possède la vie. [6] Or, si l'on a la conviction que la nature du Verbe est simple, selon toute apparence, et qu'elle ne se montre ni double ni composée, on ne saurait envisager le Verbe vivant comme participant à la vie. En effet, une conception de ce genre, soutenant que l'un est contenu dans l'autre, rentrerait dans le cas d'une nature composée. Mais il faut nécessairement, si l'on reconnaît l'unité de nature, regarder le Verbe comme vivant de lui-même, et non comme participant à la vie. [7] Si donc le Verbe vit, étant lui-même la vie, il a aussi, d'une façon absolue, la faculté de vouloir, car aucun des êtres vivants n'est dépourvu de volonté. Mais cette volonté doit logiquement, comme le veut la piété, être tenue pour puissante. Refuser de lui reconnaître la puissance, sérail soutenir absolument son impuissance. [8] Mais précisément la conception du divin exclut l'impuissance. Aucune dissonance en effet n'est admise dans la recherche de la nature divine, et il faut, de toute nécessité, convenir que la puissance du Verbe répond à sa volonté, pour qu'on n'aille pas envisager dans cette unité un mélange et une réunion de contraires ; l'impuissance et la puissance s'observeraient en effet dans la même volonté, si dans certains cas elle était puissante, et impuissante dans d'autres. La volonté du Verbe, étant toute-puissante, doit nécessairement n'incliner vers rien de ce qui est mal, car la tendance au mal est étrangère à la nature divine. Tout ce qui est bon, elle doit le vouloir, et, le voulant, le pouvoir absolument ; et cette puissance ne doit pas rester inefficace, mais transformer en actes tous ses désirs du bien. [9] Le monde est une œuvre bonne, et aussi tout ce qu'il renferme, avec la sagesse et l'habileté qui s'y observent. Donc, tout est l'œuvre du Verbe, du Verbe vivant et substantiel, puisqu'il est le Verbe de Dieu ; doué de volonté, puisqu'il vit ; capable d'exécuter tout ce qu'il choisit de faire ; choisissant absolument ce qui est bon et sage, portant enfin tous les caractères de l'excellence.
