CHAPITRE IV. LE VRAI SENS DE SAINT PAUL S'EXPLIQUE D'APRÈS SES AUTRES ÈPITRES.
5. Je donnerais à ce long texte un développement plus soigné et plus approfondi, si je n'avais à citer d'autres endroits de ses Epîtres bien plus claires encore; en les collationnant, ma première citation gagnera en évidence; et ce premier texte fût-il anéanti, les nouveaux témoignages suffiraient à la preuve. Voici, en effet, ce qu'il dit sur le même sujet, écrivant aux Corinthiens : « Ne suis-je pas libre ? Ne suis-je Apôtre ? N'ai-je pas vu Jésus-Christ, notre Seigneur? N'êtes-vous pas vous-mêmes mon ouvrage en notre Seigneur ? Quand je ne serais pas apôtre à l'égard des autres, je le suis au moins à votre égard; car vous êtes le sceau de mon apostolat en notre Seigneur. Voici ma défense contre ceux qui me reprennent : N'avons-nous pas le droit de manger et de boire ? N'avons-nous pas le pouvoir de conduire partout avec nous une femme d'entre nos soeurs, comme font les autres Apôtres, et les frères du Seigneur, et Céphas1 ? » Remarquez comme il montre d'abord son droit, et son droit à titre d'Apôtre; c'est de là qu'il part en effet : « Ne suis-je pas libre? Ne suis-je pas Apôtre ? » Et il prouve son titre d'Apôtre en ajoutant : « N'ai-je pas vu Notre-Seigneur Jésus-Christ? N'êtes-vous pas vous« mêmes mon ouvrage en notre Seigneur ? »
Ce point prouvé , il montre qu'il a droit, autant que les autres Apôtres, de ne pas travailler de ses mains, mais de vivre de l'Evangile , comme le Seigneur l'a réglé , et il continue à en donner la preuve très-évidente. En effet, si des femmes fidèles et bien pourvues d'ailleurs des biens de la terre, accompagnaient les Apôtres, si elles les aidaient de leur fortune, c'était pour leur procurer les choses nécessaires à la vie. Saint Paul démontre qu'il a le droit de suivre en ceci l'exemple de tous les Apôtres, mais il rappelle aussitôt qu'il n'a point voulu user de ce pouvoir. Quelques-uns, dans ce texte : « N'avons-nous pas le droit de conduire partout avec nous une femme-soeur », ont traduit non pas une femme notre soeur, mais une épouse. L'erreur vient du sens double du mot grec, parce que dans cette langue le même mot signifie épouse et femme. Et cependant l'Apôtre l'a employé de manière a rendre cette erreur impossible, disant non pas simplement une femme, mais une femme-soeur ; et parlant non pas de l'épouser, mais de s'en faire suivre partout. Mais cette équivoque n'a point trompé les autres interprètes, qui tous ont traduit « une femme » , et non pas « une épouse ».
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I Cor. IX , 1-7. — Gunaika adelphen periagein, littéralement conduire partout avec nous une femme-soeur. Les Protestants qui ont employé contre le célibat des prêtres ce texte de saint Paul, reçoivent, par avance, une réfutation sans réplique dans saint Augustin. ↩
