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Jésus-Christ s'entretenant avec les Juifs leur parlait souvent à mots couverts et en paraboles, à cause de leur méchanceté ; son dis cours était comme une énigme : ceci encore a été prédit anciennement : Je proposerai des questions qui sont à l'état de problème depuis la fondation dit monde, et je rapporterai des vérités cachées dès le principe. (Ps. LXXVII, 2.) Un prophète avait depuis longtemps publié la sagesse qui brillait dans ses discours : La grâce, dit-il, est répandue sur vos lèvres (Ps. XLIV, 3) ; et un autre encore avait dit : Voilà que mon fils aura l'intelligence ; il sera grand, illustre, sublime. (Is. LII, 13.) Les actions admirables et les miracles que son avènement a opérés sont rappelés sommairement dans ces autres paroles du même prophète : L'Esprit du Seigneur est sur moi; c'est pourquoi il m'a donné son onction, il m'a envoyé évangéliser les pauvres, annoncer la liberté aux captifs, et aux aveugles le rétablissement de la vue. (Is. LXI, 1.) Les Juifs, malgré tant de bienfaits qu'ils ont reçus de lui, le repousseront sans motif, puisqu'ils n'ont absolument aucun reproche à lui faire; cet aveuglement est prédit par David ; voici son oracle : Avec (371) ceux qui haïssent la paix j'étais pacifique; quand je leur parlais, ils s'élevaient contre moi sans sujet. (Ps. CXIX, 7.) Il entrera dans la ville, monté sur un âne; Zacharie l'a publié depuis longtemps : Sois comblée de joie, dit-il, fille de Sion; pousse des cris, fille de Jérusalem : voici ton roi qui vient à toi, plein de douceur, monté sur une bête de somme et son jeune poulain. (Zach. IX, 9.) Il a chassé les marchands de colombes et les changeurs. Son zèle pour la maison du Seigneur le portait à agir de la sorte, et il montrait en même temps qu'il n'est pas opposé à Dieu, mais qu'il est d'accord avec le Père; il a donc vengé l'injure qu'un tel trafic faisait à sa maison. Cette action n'est pas restée dans l'ombre plus que les autres, mais le prophète David l'a signalée, et il nous a même indiqué le motif d'une telle vengeance par ces paroles : Le zèle de votre maison me dévore. (Ps. LXVIII, 10.) Peut-on imaginer rien de plus clair ?
Il devait être trahi, et le traître était un homme qui mangeait à sa table. Ecoutez le même prophète nous annoncer ce triste événement : Celui qui mangeait mon pain a fait éclater sa trahison contre moi. (Ps. XL, 10.) Remarquez l'accord du récit évangélique avec ces paroles : Celui qui a mis la main au plat avec moi, dit Jésus-Christ, celui-là me trahira. (Matt. XXVI, 23.) Non content de trahir, le traître devait vendre le sang précieux à prix d'argent; le Prophète le dit, il rapporte ce marché honteux et les paroles échangées. Que voulez-vous me donner, dit Juda, et je vous le livrerai? Ils répondirent : Trente pièces d'argent. C'est à cela que le Prophète fait allusion quand il dit : O Dieu, ne taisez pas ma louange, parce que la bouche du, pécheur et la bouche de l'homme trompeur se sont ouvertes pour me nuire. (Ps. CVIII, 1.) Ce traître enfin, bourrelé par le souvenir de son attentat, jeta les pièces d'argent, courut se pendre et termina ainsi ses jours, laissant sa femme veuve, ses enfants orphelins et sa maison déserte. Entendez avec quels accents pathétiques le Prophète raconte ce tragique événement : Que ses enfants deviennent orphelins, dit-il , et que sa femme devienne veuve; que ses enfants errent vagabonds d'un lieu à l'autre, et qu'ils soient chassés de leurs demeures! (Ps. CVIII, 9, 10.)
Matthias reçut dans l'apostolat la place laissée vacante par le traître. Le même prophète l'avait annoncé : Qu'un autre, dit-il, reçoive son épiscopat. (Ibid. 8.) Quand Jésus-Christ, eut librement consenti à être trahi et qu'on se fut saisi de sa personne, il se forma un tribunal d'iniquité, composé de Juifs et de Gentils. Voyons encore comment ce fait est prédit par le Prophète : Pourquoi, dit-il, les nations ont-elles frémi, et les peuples ont-ils médité de vains complots ? (Ps. II, 1.) C'est peu encore; il n'est pas jusqu'au silence dans lequel il se renferma, au milieu d'une infinité de discours et d'accusations, qu'Isaïe n'ait annoncé par ces paroles : Il a été conduit à la mort comme une brebis ; et comme un agneau muet sous la main de celui qui le tond, il n'a pas ouvert la bouche. (Is. LIII, 7.) Le Prophète montre ensuite l'iniquité de la sentence : Une sentence a été portée contre son humilité; c'est-à-dire que les juges n'ont pas prononcé cette sentence selon l'équité. Nous voyons encore le Prophète indiquer la cause de son immolation. Ce n'est pas à cause de ses péchés, il était innocent et irrépréhensible, c'est pour les crimes du monde entier qu'il a été livré. Isaïe insinue lui-même cette double considération quand il dit de Jésus-Christ : Il n'a pas commis de péchés, et la fraude n'a pas été trouvée sur ses lèvres. (Isaïe LIII, 5.) Poussant encore plus loin, le Prophète veut nous faire connaître le profit que nous avons retiré de la croix et de ce sacrifice; voici l'oracle qu'il prononce : Nous étions tous errants comme des brebis; l'homme s'était égaré de son chemin : le châtiment, cause de notre paix, est tombé sur lui; nous avons tous été guéris par ses meurtrissures. (Is. LIII, 6.) Enfin, la même prophétie nous signale ainsi la peine qui devait être infligée aux Juifs pour tous leurs attentats : Je lui donnerai les impies pour prix de sa sépulture, et les riches en échange de sa mort. (Ib. 9.) David ayant dit à son tour : Rejetons de nous leur joug, ajoute : Celui qui habite dans les cieux se rira d'eux; alors, il leur parlera dans sa colère, et dans sa fureur il, les remplira de trouble. (Ps. II, 3.) Leur dispersion dans le monde entier est prédite par ces paroles. Mais Jésus-Christ lui-même nous fait connaître dans l'Evangile la peine qui les attend : Pour ceux qui n'ont pas voulu m'avoir pour roi, qu'on les amène ici, est-il écrit, et qu'on les immole. (Luc, XIX, 27.)
Après avoir parlé du sacrifice, les prophètes n'ont pas oublié de dire la manière dont il s'est accompli, et David a donné ces détails : Ils ont (372) percé mes mains et mes pieds, ils ont compté tous mes os. (Ps. XXI,17, 18.) Quant à l'iniquité commise par les soldats après qu'ils eurent attaché Jésus à la croix, il en est fait aussi mention dans ces autres paroles du Psalmiste : Ils se sont partagé mes vêtements, et ils ont jeté le sort sur ma robe. (Ps. XXI, 19.)
Sa sépulture est annoncée par ces autres paroles du même prophète : On m'a mis dans une fosse profonde, dans des lieux ténébreux et dans l'ombre de la mort. (Ps. LXXXVII, 7.) Voici encore comment David prédit sa résurrection : Vous ne laisserez pas, dit-il, mon âme en enfer, et vous ne souffrirez pas que votre saint endure la corruption. (Ps. XV, 10.) Isaïe en parle aussi en d'autres termes : Le Seigneur veut le guérir de sa blessure, lui montrer la lumière, justifier le juste qui a été utile à un grand nombre. (Is. LIII, 10, 11.) Puis, dans une série de prophéties, il nous montre tout aussi clairement l'expiation des péchés des hommes par le sacrifice de Jésus-Christ : Il a porté lui-même les péchés de plusieurs (Ibid. 12) ; les hommes délivrés des démons : Il distribuera les dépouilles du fort; la mort de l'Homme-Dieu, principe de ce pouvoir : Parce qu'il a été livré à la mort (Ibid.) ; enfin, son empire établi sur le monde entier : Il possédera par héritage une grande multitude. (Ibid.)
Quand le Libérateur descendit aux enfers, il remplit tout de trouble, c'était un tumulte, une confusion universelle, et la forteresse fut démolie. Les prophètes n'ont pas oublié cet événement, écoutez plutôt ce que crie David : Princes, ouvrez vos portes; ouvrez-vous, portes éternelles, et le Roi de gloire entrera. (Ps. XXIII, 7.) Isaïe en parle aussi de la sorte : Je briserai les portes d'airain et je romprai les verroux de fer; je vous découvrirai des trésors enfouis dans les ténèbres, et je vous montrerai des trésors cachés, invisibles. (Is. XLV, 2.) C'est l'enfer que le Prophète appelle ainsi; car, tout enfer qu'il était, il contenait les saintes âmes et les vases précieux, Abraham, Isaac et Jacob. Voilà pourquoi Isaïe lui donne le nom de trésors, mais trésors enfouis dans les ténèbres, parce que le soleil de justice n'y avait pas encore répandu l'éclat de sa lumière ni l'annonce de la résurrection. Et quand cette résurrection sera accomplie, le Fils de l'homme n'ira pas prendre place parmi les anges ni les archanges, ni aucunes autres puissances subordonnées, mais il s'assiéra sur le trône royal; nous l'apprenons encore de David dont voici les paroles : Le Seigneur a dit à mon Seigneur : Asseyez-vous à ma droite jusqu'à ce que je mette vos ennemis comme un escabeau sous vos pieds. (Ps. CIX, 1.)
