3.
Mais ici les hérétiques nous assaillent encore et disent : Voici que le Père ressuscite le Fils. Par l'effet de la maladie dont ils ont été une fois atteints, ils se refusent à entendre les plus sublimes de nos dogmes; et quand ils rencontrent des expressions humbles et ordinaires, employées soit à cause de la chair, soit pour honorer Dieu, soit dans un autre but, ils les recueillent et les examinent séparément, et se font du tort à eux-mêmes, car je ne saurais Aire qu'ils en font à l'Ecriture. Je voudrais bien leur demander pourquoi ils disent cela. Ont-ils l'intention de prouver que le Fils est faible, et qu'il n'a pas la force de ressusciter un seul corps? Et cependant la foi en lui et même dans les ombres de ceux qui croyaient en lui a fait ressusciter des morts. (Act. V, 15.) Quoi, ces hommes qui croyaient en lui, et qui étaient mortels, ont pu rendre des morts à la vie rien que par l'effet de l'ombre que projetaient leurs corps de boue, et par le contact des vêtements qui enveloppaient ces mêmes corps, et lui, n'a pas eu la force de se ressusciter lui-même? Quelle évidente folie, quel excès de démence ! Ne l'as-tu pas entendu dire : « Détruisez ce temple et je le relèverai en trois jours » (Jean, II, 19) ? et une autre fois : « J'ai le pouvoir de déposer mon âme, et j'ai le pouvoir de la reprendre? » (Jean, X, 18.) Pourquoi donc est-il dit que son Père l'a ressuscité? Pour attribuer au Père les oeuvres du Fils, afin d'honorer le Père et de ménager la faiblesse des auditeurs.
« Et tous les frères qui sont avec moi ». Pourquoi n'en fait-il pas mention dans ses autres épîtres? Ou bien il n'y met que son nom, ou bien il y joint celui de deux ou de trois de ses compagnons. Ici il fait figurer tout un groupe de fidèles, c'est pourquoi il n'en désigne aucun par son nom. Pourquoi donc fait-il cela? On l'accusait d'être seul à prêcher ce qu'il prêchait, et d'introduire dés nouveautés dans le dogme. Voulant faire tomber ces soupçons, et (576) montrer que ses idées ont beaucoup de partisans, il réunit les frères en un seul groupe, et prouve que ce qu'il écrit, il l'écrit en conformité de sentiment avec eux., « Aux Églises de « Galatie ». Ce n'était pas une seule ville, ni deux, ni- trois, mais toute la nation des Galates qui était consumée par ce fléau de l'erreur. Voyez encore ici une preuve de sa profonde indignation. Il n'a pas dit : A nos bien-aimés, ni à nos saints de Galatie; mais « Aux Églises de Galatie ». .C'était .bien là le langage d'un homme dont le coeur est ulcéré, d'un homme qui témoigne son affliction, que de s'adresser à eux sans employer de termes d'amitié ou de politesse, de les désigner seulement par un nom collectif, et de ne pas dire : « Aux Églises de Dieu », mais tout simplement : « Aux Églises de Galatie ». D'ailleurs il est pressé dès le début de les arrêter dans leur tentative de séparation : c'est pour cela qu'il les comprend tous sous ce nom d'Église, afin de les faire rentrer en eux-mêmes et de les réunir en un seul corps. Car ceux qui sont divisés en plusieurs partis ne sauraient être désignés parce nom-là. Ce nom d'Église est synonyme d'accord et de bonne intelligence.
Que la grâce et la paix vous soient données «par la bonté de Dieu le Père, et par Notre« Seigneur Jésus-Christ ». Dans toutes ses épîtres, il met cette formule nécessaire, à plus forte raison dans cette épître qu'il adresse aux Galates. C'est parce qu'ils étaient en danger de perdre la grâce, qu'il leur souhaite de pouvoir l'acquérir de nouveau. C'est parce qu'ils s'étaient mis en guerre avec Dieu, qu'il prie Dieu de ramener la paix parmi eux.
« Par la bonté de Dieu le Père ». — Voilà encore qui nous permet de confondre les hérétiques. lis prétendent que Jean, qui a dit au commencement de ses Evangiles : « Et le Verbe était Dieu », a mis le mot Dieu sans article pour marquer que la divinité du Fils était inférieure 1, et ils font: encore observer que Paul, en disant que le Fils avait la forme de Dieu, n'a pas voulu parler du Père, puisqu'il a employé le mot Dieu sans le faire précéder de l'article. Que diront-ils donc maintenant? Car Paul ne dit pas : Apo tou Theou mais Apo Theou Patris. S'il donne à Dieu, dans ce passage, là qualification de Père, ce n'est pas pour flatter les Galates ; loin de là , il les reprend vivement en leur rappelant la cause par laquelle ils sont devenus les fils de Dieu. Cet honneur, ils le doivent non pas à la loi, mais au baptême qui les a régénérés. Aussi partout, même dès le début, répand-il les preuves de la bienfaisance de Dieu. Ses paroles peuvent se traduire ainsi : Vous qui étiez esclaves, ennemis, étrangers, comment se peut-il que vous appeliez tout à coup Dieu votre Père? Est-ce à la loi que vous devez cette parenté? Pourquoi donc, laissez-vous celui qui vous a tant rapprochés de Dieu, et courez-vous encore au pédagogue? Non-seulement en ce qui concerne le Père, mais aussi en ce qui concerne le Fils, les noms dont on les désigne suffisaient à rappeler aux Galates la bienfaisance dont ils étaient l'objet. Le nom de Jésus-Christ, si nous l'examinons avec soin, retrace à notre esprit tous ses bienfaits. Car Jésus, dit l'Écriture, sera ainsi appelé : « Parce qu'il sauvera lui-même son peuple de ses propres péchés » (Matth. I, 21) ; et le nom du, Christ rappelle l'onction qu'il reçut du Saint-Esprit : « (Et par Notre Seigneur Jésus-Christ) qui s'est donné lui-même pour nos péchés (4) ».
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C'est l'argument d'Eusèbe de Césarée. Contra Marcellum, 16, 17. ↩
