2.
Dans les livres que je viens de rappeler, j’ai dit hautement que le baptême peut être conféré en dehors de la communion catholique, comme il peut y être possédé et conservé. Tous les Donatistes n’affirment-ils pas que les apostats conservent en eux le caractère du baptême? Et, en effet, qu’un apostat se repente de son crime et revienne à résipiscence, on ne lui rend pas le baptême, ce qui prouve qu’on le regarde comme l’ayant conservé. De même, s’il s’agit de ceux qui par le schisme se sont séparés de l’Eglise, il n’est pas moins certain qu’ils conservent le baptême reçu avant leur séparation; car s’ils font pénitence, et rentrent dans l’unité, on ne leur réitère pas le sacrement, ce qui prouve qu’on les regarde comme n’ayant pu perdre, par leur crime, le baptême qu’ils avaient précédemment reçu. Or, si l’on peut validement posséder le baptême hors de I’Eglise, pourquoi donc ne pourrait-on pas l’y conférer validement? Mais, me direz-vous, cette collation du baptême hors de l’Eglise n’est pas légitime; je vous réponds La possession du baptême hors de l’Eglise n’est pas légitime, et cependant elle existe; de même la collation n’est pas légitime, et cependant elle est valide. Hors de l’Eglise le baptême que vous aviez reçu vous devenait inutile pour le salut, tandis qu’il recouvre son efficacité dès que vous êtes rentré dans l’unité; de même, dès que vous rentrez dans l’unité, le sacrement qui vous avait été inutilement conféré hors de l’Eglise, commence à produire en vous ses nombreux effets. C’est donc une erreur de soutenir que ce qui a été donné n’a pas été donné; ou d’affirmer que tel homme n’a pu donner ce qu’il assure avoir reçu validement. En effet, dès qu’un homme est baptisé, il possède le sacrement de baptême, et dès qu’il est ordonné, il ale droit et le pouvoir de baptiser. Or, de même que celui qui est baptisé ne perd pas le sacrement de baptême, en se séparant de l’unité; de même en se jetant dans le schisme, celui qui a été ordonné ne perd pas le droit de conférer le baptême. Aucun de ces deux sacrements ne saurait être outragé : si l’un des deux quitte les méchants, l’autre les quitte également; et si l’un des deux persévère au milieu des méchants, l’autre y persévère au même titre. De même donc qu’on ratifie le baptême que n’a pu perdre celui qui s’était séparé de l’unité; de même on doit ratifier le baptême conféré par un ministre, qui, en se séparant de l’unité, n’avait pas perdu le sacrement de l’ordination. On ne réitère pas le baptême à ceux qui, rentrant dans l’unité, avaient reçu ce sacrement avant de tomber dans le schisme; de même on ne réitère pas l’ordination à ceux qui, rentrant dans l’unité, avaient été ordonnés avant de tomber dans le schisme: si l’Eglise le juge utile, elle leur permet d’administrer ce qu’ils administraient; et si, pour les punir, elle leur refuse cette autorisation, elle ne laisse pas de les regarder comme réellement ordonnés et s’abstient de leur imposer les mains, comme elle les impose aux laïques. Félicianus, par exemple, avait-il donc perdu le baptême et l’ordination, en quittant les Donatistes pour embrasser la secte de Maximien? Est-ce que ces mêmes Donatistes n’ont pas ouvert leurs rangs à tous ceux que Félicianus avait baptisés pendant qu’il appartenait au schisme de Maximien? Ainsi donc, des hommes qui n’avaient jamais appartenu à l’Eglise, ont pu recevoir de la main des Donatistes et des Maximianistes ce que ceux-ci n’avaient pas perdu en se séparant de l’unité. J’en conclus que c’est une impiété sacrilège de vouloir rebaptiser l’unité catholique, et que nous sommes parfaitement dans la vérité lorsque nous refusons d’invalider les sacrements, alors même qu’il ont été conférés dans le schisme. En effet, les schismatiques sont avec nous dans les points sur lesquels ils pensent comme nous; comme aussi ils se séparent de nous dans les points sur lesquels ils ont une doctrine différente de la nôtre. Rappelons-nous qu’il s’agit ici de matières essentiellement spirituelles, et qu’il serait absurde de vouloir leur appliquer les lois qui régissent les mouvements corporels dans leur rapprochement ou leur éloignement. L’union des corps s’opère par la conjonction des mêmes lignes; de même le contact des esprits s’opère par la conjonction des volontés. Si donc, celui qui s’est séparé de l’unité, prétend faire autre chose et user de pouvoirs qu’il n’a pas reçus dans l’unité, par cela même il s’éloigne et se sépare; au contraire, tant qu’il ne fait que ce qui se fait dans l’unité, et observe les conditions essentielles qui lui ont été enseignées, en cela du moins il reste et persévère dans l’unité.
