4.
Nous affirmons deux choses, savoir que l’Eglise possède le véritable baptême et qu’elle seule le confère légitimement: ces deux choses sont niées par les Donatistes. Nous affirmons ensuite que les Donatistes possèdent également le véritable baptême, mais qu’ils le confèrent illégitimement; de leur côté, ils proclament avec emphase le premier de ces deux points, c’est-à-dire qu’ils possèdent le véritable baptême; quant à la collation illégitime qu’ils font de ce sacrement, ils ne veulent pas l’avouer. Ainsi, de ces quatre propositions, trois nous sont exclusivement personnelles, une seule nous est commune à eux et à nous. Seuls, nous soutenons contre eux que l’Eglise catholique possède le véritable baptême, qu’il n’y a qu’elle pour le conférer légitimement, et que la collation qui en est faite par les Donatistes est illégitime; quant à l’existence du véritable baptême parmi eux, ils l’affirment, et nous le leur concédons facilement. Or, je suppose dans un homme le désir de recevoir le véritable baptême; il est convaincu d’ailleurs que c’est uniquement dans l’Eglise catholique qu’il doit chercher le salut, et que c’est là seulement que le baptême de Jésus-Christ peut produire ses précieux effets, lors même qu’il aurait été reçu dans le schisme; d’un autre côté, c’est dans la secte de Donat qu’il veut être baptisé, dit-il, puisque Donatistes et catholiques, tous sont unanimes à attribuer à cette secte la possession du véritable baptême. Que cette considération le frappe, j’y consens, mais qu’il réfléchisse également aux trois autres propositions. En effet, s’il a pris le parti d’adopter les trois maximes que nos adversaires rejettent, tout en préférant la doctrine émise en même temps par les catholiques et par les Donatistes, à celle qui nous est exclusivement personnelle; je dois d’abord constater que son choix est tout à notre avantage, puisqu’il préfère nos affirmations aux négations correspondantes de nos adversaires. Or, nous disons que l’Eglise catholique possède le véritable baptême; les Donatistes le. nient. Nous disons que l’Eglise catholique confère légitimement le baptême; les Donatistes le nient. Nous disons que la collation du baptême faite par les Donatistes est illégitime; les Donatistes le nient. Donc, puisque sur tous les points contradictoirement affirmés ou niés par les catholiques et par les Donatistes, c’est à nous qu’il donne la préférence, qu’il se montre conséquent et qu’il fasse ce que seuls nous lui disons de faire. Quant à la seule vérité sur laquelle les uns et les autres nous tombons d’accord, elle doit lui apparaître avec un caractère de certitude que n’ont pas sans doute, à ses yeux, les propositions émises par nous et niées par nos adversaires. Catholiques et Donatistes, nous affirmons tous que le baptême de Jésus-Christ se trouve dans la secte de Donat; cette affirmation doit donc lui paraître plus certaine que toutes celles que nous formulons seuls, nous catholiques. Mais, d’un autre côté, quand nous affirmons que l’Eglise catholique possède également le baptême de Jésus-Christ, tandis que les Donatistes le nient, c’est notre parole qu’il doit croire et non pas celle des Donatistes, puisqu’il a pris le sage parti de nous donner la préférence toutes les fois qu’il y a contradiction entre nous et nos adversaires. De même nous disons que l’Eglise catholique confère légitimement le baptême, les Donatistes le nient; donc, c’est à nous qu’il doit s’en rapporter. Enfin, nous affirmons que la collation du baptême faite par les Donatistes est illégitime; les Donatistes le nient; par conséquent, toujours d’après la même règle, c’est nous qu’il doit accepter comme juges, Par conséquent, c’est en vain qu’il se croirait le droit de recevoir dans cette secte un sacrement qu’elle possède, il est vrai, nous en convenons tous, mais que selon nous du moins elle ne doit pas administrer. N’oublions pas que le néophyte dont je parle est intimement convaincu que c’est à nous qu’il doit s’en rapporter, toutes les fois qu’il y a contradiction entre nous et les Donatistes. S’il veut être en sûreté, qu’il reçoive donc le baptême là où il se trouve, et là seulement où l’on peut le conférer légitimement; au contraire, qu’il se garde bien de le recevoir dans une secte, qui le possède, il est vrai, mais à laquelle nous refusons le droit de l’administrer, nous dont l’opinion doit être pour lui sa règle de conduite. Supposé même que la collation faite par les Donatistes, sans lui paraître absolument illégitime , lui parût seulement douteuse, tandis que la collation faite par les catholiques lui paraît de tous points légitime, je dis qu’il pécherait mortellement, par cela seul que, sur un point nécessaire au salut, il négligerait ce qui est certain pour embrasser le parti douteux. Ce qui prouve qu’il est assuré de la légitimité du baptême dans l’Eglise catholique, c’est la résolution qu’il a prise d’entrer dans cette Eglise après avoir été baptisé dans le schisme. Quant à la légitimité du baptême des Donatistes, le moins qu’il puisse faire, c’est de la regarder comme douteuse, puisque ceux dont il doit préférer le témoignage le lui affirment sans hésiter. Qu’il préfère donc le certain à l’incertain, et qu’il reçoive le baptême là où il est certain de sa légitimité; tel est le seul parti qui lui reste à prendre, puisqu’il se proposait de revenir à l’Eglise catholique, après avoir reçu le baptême dans le schisme.
