4.
A cela peut-être Pélage répondrait qu'en parlant de la connaissance de la loi, sans laquelle aucun homme ne saurait être sans péché, il entend la doctrine même de la foi, telle qu'on l'enseigne aux néophytes, aux enfants déjà baptisés, voire même aux catéchumènes quand il s'agit de leur apprendre le symbole. Quant à cette autre science plus complète et qui distingue les docteurs de la loi, jamais il n'aurait eu la pensée de la poser comme condition essentielle à l'exemption du péché. J'admets au besoin cette interprétation; je veux bien croire que sous ce titre pompeux de science de la loi, il n'entendait parler que du symbole qui ne renferme que quelques paroles, mais des paroles d'une portée immense, et dont on intime fidèlement la connaissance à ceux que l'on prépare au baptême. Si c'est là cette science de la loi, dont il a dit: « Que personne ne peut être sans péché, si ce n'est celui qui a la science de la loi » ; science que l'on exige toujours de ceux qui ont la foi, avant de les admettre à la rémission des péchés : j'accepte cette explication bienveillante et intéressée. Cependant je l'invite encore à regarder autour de lui, il se verra enveloppé d'une multitude, non pas de philosophes, mais de tout petits enfants encore au berceau, et qui lui diront, non pas par la parole mais par leur innocence Quoi donc, qu'avez-vous écrit « que personne ne peut être sans péché, si ce n'est celui qui possède la science de la loi ? » Nous formons tous ici un immense troupeau d'agneaux immaculés, et cependant nous n'avons pas la science de la loi. Devant le silence de leurs lèvres et les protestations de leur coeur, Pélage resterait muet, ou sa première parole serait pour avouer, ou bien qu'il renonce aujourd'hui à son ancienne perversité, ou qu'il n'a jamais eu d'autre opinion que celle qui a mérité l'approbation du tribunal ecclésiastique. Son crime alors serait uniquement d'avoir mal rendu sa pensée; dès lors, sa foi serait à louer, et son livre à corriger. Ne lisons-nous pas dans l'Ecriture : « Qu'on peut pécher dans son langage, sans être coupable dans son coeur1 ? » A ce prix, on lui pardonnerait facilement la négligence et la témérité de son langage, puisqu'il répudierait le sens naturel de ses paroles, et laisserait à la vérité seule le soin de lui dicter sa croyance. Telle fut sans doute la conclusion que tirèrent ces pieux évêques; ils acceptèrent l'interprétation qui leur fut donnée du texte latin, et comme cette interprétation et la réponse de Pélage furent exprimées en grec, ils les comprirent facilement et les déclarèrent conformes à la doctrine de l'Eglise. Mais voyons la suite.
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Eccli. XIX, 16. ↩
