5.
Parlant ensuite du mariage, je me suis toujours expliqué de la même manière : « Ce mariage,» ai-je dit, « ne fait rien à notre sujet ; car saint Paul nous enseigne par là ce que Jésus-Christ a dit dans l'Évangile, qu'un mari ne doit point répudier sa femme, à moins qu'elle ne soit coupable d'adultère, et que s'il la répudie elle ne peut se marier à un autre du vivant de son mari, mais qu'elle doit au contraire se réconcilier avec lui ; et dans un autre endroit, « la femme, » dit saint Paul, « est liée tant que son mari est vivant, mais si son mari meurt elle est affranchie de la loi du mariage, et il lui est libre de se marier à qui elle voudra pourvu que ce soit selon le Seigneur,» c'est-à-dire pourvu qu'elle se marie à un chrétien. L'Apôtre permet de se marier à un chrétien en secondes et en troisièmes noces, mais il défend de se marier à un païen, même en premières noces. » Je prie ici mes calomniateurs de faire attention à ces paroles, et de remarquer que je consens qu'on se marie deux et trois fois, pourvu que ce soit selon le Seigneur : comment donc pourrais-je condamner les premières noces, puisque je ne condamne ni les secondes ni les troisièmes?
Lorsque j'ai expliqué cet endroit de l'apôtre saint Paul : « Si un homme est appelé à la foi étant circoncis, qu'il n'affecte point de paraître incirconcis, et s'il y est appelé n'étant point circoncis, qu'il ne se fasse point circoncire, » quoique plusieurs interprètes habiles appliquent ce passage à la circoncision et aux obligations de la loi, n'en ai-je pas fait l'application au mariage en disant : « Si quelqu'un est appelé n'étant point circoncis, qu'il ne se fasse point circoncire? » c'est-à-dire : Si vous étiez marié lorsque vous avez été appelé à la foi, ne pensez pas que la religion de Jésus-Christ, que vous avez embrassée, vous oblige à vous séparer de votre femme; car Dieu nous a appelés pour vivre en paix. Ce n'est rien d'être circoncis et ce n'est rien d'être incirconcis, mais le tout est d'observer les commandements de Dieu. Le mariage et le célibat sont inutiles sans les bonnes oeuvres, et la foi même des chrétiens est une foi morte si elle. n'est soutenue par la pratique des bonnes oeuvres; autrement l'on pourrait mettre au nombre des saintes les vestales et les femmes qui, après avoir été mariées une fois, se consacraient à Junon. Saint Paul ajoute : « Si vous avez été appelé étant esclave ne vous en mettez point en peine, mais, quand bien même vous pourriez devenir libre, demeurez dans la condition d'esclave , » c'est-à-dire: Si vous êtes marié et attaché à une femme, si vous lui rendez le devoir parce que votre corps n'est pas en votre puissance, ou, pour mieux dire, si vous êtes esclave de votre femme, ne vous chagrinez point pour cela et ne regrettez point la perte de votre virginité; et, quand bien même vous pourriez trouver quelque prétexte de rompre vos liens afin de vivre librement en continence, n'exposez point le salut de votre épouse pour ménager le vôtre : souffrez encore quelque temps; ne courez point plus vite qu'elle, attendez-la; ayez un peu de patience, et bientôt elle deviendra votre soeur.
