4.
On ne peut reprocher à mon ami que d'avoir livré trop vite au public ce que vous vous disposiez à retoucher peu à peu ; si , au contraire, comme vous le voulez, ces écrits ont été altérés par Eusèbe, pourquoi ne cessez-vous de dire et d'affirmer que l'on a mis au jour des ouvres ; imparfaites encore, et qui même n'étaient pas revues? Corrigées ou non corrigées, elles sont frappées de la même condamnation. Personne, dites-vous, ou presque personne , ne les avait à sa disposition; quelle contradiction dans ce peu de mots! Si personne ne les avait, comment quelques personnes les possédaient-elles? Si quelques personnes les possédaient , pourquoi prétendre qu'elles n'étaient au pouvoir d'aucune? Vous mentez lorsque vous dites que peu de monde les possédait, et que, d'un autre côté, vos propres expressions indiquent au contraire que personne ne les possédait. Qu'avez-vous fait de ce secrétaire que vous affirmez avoir été acheté? Dites son nom, la somme qu'on lui a versée, des mains de qui il l'a reçue; et, sans doute, vous avez rejeté loin de vous ce traître, vous avez repoussé de votre maison cet homme coupable d'une si mauvaise action. Mais voyez plutôt s'il n'est pas vrai qu'Eusèbe et d'autres personnes aient reçu vos écrits du petit nombre de vos amis qui en possédaient? Les divers exemplaires se ressemblent tellement et s'accordent tellement entre eux, qu'ils ne diffèrent l'un de l'autre par quoi que ce soit. Quelle est donc votre imprudence de livrer au public un ouvrage encore imparfait? Vos écrits n'étaient pas encore revus que déjà tout le monde avait lu des erreurs que vous deviez faire disparaître. Ne sentez-Vous pas que vos mensonges ne s'accordent pas entre eux ? Que vous a-t-il servi de vous écarter de l'opinion des évêques, d'engager une lutte et de vous faire condamner par vos propres discours? D'où l'on voit que, selon l'expression d'un grand orateur, vous avez l'intention de mentir, mais que vous n'avez pas ce talent. Je suivrai l'ordre de votre lettre, et je rapporterai même vos propres expressions. Vous dites : «J'ai t'ait l'éloge de votre éloquence dans mes écrits , je l'avoue , et ,je serais encore disposé à le faire, si, contre l'avis de votre cher Tullius, vous ne me l'aviez rendue odieuse par votre vanité. » Où ai-je vanté mes talents , moi qui ai reçu vos louanges avec peine? Est-ce que vous parlez ainsi, parce que vous ne voulez pas être flatté par de fausses louanges? Eh bien ! je vous attaquerai ouvertement, afin que vous sachiez ce que c'est qu'une accusation, vous qui dédaignez la louange.
