5.
Vous m'avez prié avec instance dans vos lettres que je vous entretinsse d'Aaron et des habillements du grand prêtre. J'ai fait plus que vous n'avez demandé , ayant mis à la tête de ce discours une petite préface où j'ai traité des prémices des fruits, des parties de la victime qui étaient données aux prêtres pour leur nourriture, et des lois que le grand prêtre était obligé de garder. Mais, sortant de Sodome, et vous hâtant de monter sur le sommet de la montagne, vous laissez derrière vous les Israélites et les lévites; vous allez même aussi vite que si vous voliez, plus loin que les prêtres, et vous venez enfin jusqu'au grand prêtre. Cependant, quoique. vous vous informiez soigneusement de ses habillements auprès: de moi, je crois que notre compagnie ne vous est pas agréable. Ce n'est pas que vous ne jouissiez, peut-être d'un repos très doux, et qu'auprès de Babylone, où vous êtes, vous ne soupiriez après Bethléem; mais pour nous, à la fin, nous y avons trouvé la paix; nous y entendons, dans la crèche, les cris de l'Enfant, et je souhaiterais que le bruit de ses pleurs et de ses petites plaintes pût aller jusqu'à vos oreilles.
Il est fait mention dans l'Exode du tabernacle, d'une table, d'un chandelier, d'un autel, de colonnes, détentes de lin, de pourpre, d'écarlate, de différents vases d'or, d'argent et d'airain, de la division du tabernacle en trois, de douze pains qui se mettaient sur la table toutes les semaines, de sept lampes attachées au chandelier, d'un autel pour les victimes et les holocaustes, de tasses, d'encensoirs, de fioles, de mortiers, de poteaux, de peaux teintes en écarlate, de poils de chèvre, et de bois incorruptible. Toutes ces choses différentes servaient au tabernacle de Dieu, pour nous apprendre que personne ne doit désespérer de son salut. En effet, les uns peuvent offrir l'or de leur sens, les autres l'argent de leurs paroles , et les autres le bronze de leur voix.
Le monde entier nous est représenté par le tabernacle, dont le premier et le second vestibule étaient ouverts à toutes sortes de personnes, car l'eau et la terre ont été créés pour tous les hommes; mais l'entrée du sanctuaire, qu'on appelait autrement: le lieu saint des lieux saints, n'était libre qu'à peu de gens, comme s'il y en avait peu qui pussent entrer dans le ciel. Les douze pains sont la figure des douze mois de l'année, et les sept lampes attachées au chandelier, celle des sept planètes.
Mais pour ne pas m'étendre davantage sur ce sujet, ne m'étant pas proposé de faire ici la description du tabernacle entier, je commencerai à parler des habillements des prêtres, vous apprenant comment ils étaient faits et les propres noms qu'ils avaient parmi les Juifs, avant de vous expliquer les mystères qui y étaient renfermés, afin que vous en ayant fait la peinture, et vous ayant, pour ainsi dire, placé devant les yeux les prêtres revêtus de leurs ornements, je puisse ensuite vous expliquer plus facilement la raison de chacun en particulier. Commençons d'abord par les habillements communs aux prêtres et au grand prêtre.
Le premier, qui était de lin, leur descendait jusqu'aux genoux, cachant ce que la pudeur et la bienséance défendent de découvrir. La partie du haut en était liée très serré sous le nombril, afin que si, tombant en immolant les victimes, en portant des taureaux et des béliers, ou en s'acquittant de quelque autre fonction de leur ministère, on voyait par hasard leurs cuisses, ce qui devait être caché le fat toujours. C'était aussi pour cette raison qu'il était défendu d'élever l'autel, de peur que, lorsque les prêtres monteraient sur les degrés, le peuple ne vit quelque chose qui choquât l’honnêteté. Les Hébreux appellent cette sorte d'habillement michenese, les Grecs périsquele, et nous autres caleçon. Joseph, qui était de la tribu des prêtres et qui a vu le temple, qui n'était pas démoli de son temps, Vespasien et Tite n'ayant pas encore saccagé Jérusalem, rapporte (et l'on tonnait toujours mieux ce que l'on voit que ce que l'on apprend par le récit des autres) que cet habillement étant taillé, on le cousait à l'aiguille avec du fil de lin, afin que les parties en tinssent mieux les unes aux autres, parce. qu'on ne pouvait pas le faire au métier de tisserand.
