2.
Voyez-vous comme le nom et le mode de l'Evangile sont clairement énoncés dans l'Ancien Testament ? Car, dit-il, nous n'évangélisons pas seulement en paroles, mais en action ; vu que ce n'est point une oeuvre humaine, mais divine, mystérieuse, et élevée au-dessus de toute la nature. Et comme on traitait la chose de nouveauté, il démontre qu'elle est plus ancienne que les Grecs et déjà décrite d'avance par les prophètes. Que si elle n'a pas été donnée dès le commencement, la faute en est à ceux qui n'ont pas voulu la recevoir; car ceux qui l'ont voulu, ont entendu. « Abraham votre père », dit le Christ, « a tressailli pour voir mon jour ; il 'a vu et il s'en est réjoui ». (Jean, VIII, 56.) Comment donc le Sauveur dit-il ailleurs: «Beaucoup de prophètes et de justes ont désiré voir ce que vous voyez, et ne l'ont pas vu? » (Matth. XIII, 17.) C'est-à-dire, voir comme vous voyez et entendez, la chair même, les signes visibles. Mais considérez combien de temps à l'avance cela avait été prédit : car quand Dieu prépare de grandes choses, il les annonce longtemps d'avance, afin de disposer nos oreilles à les accueillir quand elles arriveront. — « Dans les Saintes Ecritures ». Les prophètes ne parlaient pas seulement, mais ils écrivaient ce qu'ils disaient; non-seulement ils l'écrivaient, mais ils le représentaient en figures, comme Abraham conduisant Isaac, Moïse élevant le serpent, ou étendant les mains contre Amalec, ou immolant l'agneau de la Pâque.
« Touchant son Fils qui lui est né de David « selon la chair (3) ». Que faites-vous , Paul ? Après avoir élevé nos esprits, nous avoir fait pressentir des choses sublimes et mystérieuses, avoir parlé d'Evangile et d'Evangile de Dieu, introduit le choeur des prophètes et avoir démontré que tous ont prédit longtemps d'avance ces événements futurs ; après tout cela, dis-je, comment nous ramenez-vous à David ? De grâce, quel est l'homme dont vous parlez, et à qui vous donnez pour père le fils de Jessé ? Comment cela répond-il à ce que vous venez de dire ? — Cela y répond parfaitement; car, nous dit-il, il ne s'agit pas ici d'un pur mortel. Aussi ajoute-t-il : « Selon la chair », insinuant par là qu'il a aussi une génération selon l'Esprit.
Et pourquoi a-t-il commencé par là, et non par le côté le plus élevé ? Parce que Matthieu, Luc et Marc l'ont fait aussi. Car celui qui veut conduire au ciel, doit nécessairement commencer par ce qu'il y a de plus bas pour élever à ce qu'il y a de plus haut : c'est l'ordre suivi par le Verbe incarné. On l'a d'abord vu comme homme sur la terre, puis on a compris le Dieu. Ainsi la manière dont le Maître a réglé son enseignement, est celle que le disciple adopte pour tracer la voie qui conduit au ciel. Il parlera donc d'abord de la génération selon la chair, non parce qu'elle est la première , mais parce qu'il veut élever l'esprit de son auditeur de celle-là à l'autre.
« Qui a été prédestiné Fils de Dieu en puissance selon l'Esprit de sanctification, par la résurrection de Jésus-Christ d'entre les morts (4) ». La complication des termes rend ici le sens obscur; aussi devons-nous distinguer. Que dit-il donc ? Nous prêchons Celui qui est né de David : voilà qui est clair. Mais qu'est-ce qui montre que celui-là est aussi le Fils de Dieu qui s'est incarné ? La première preuve est tirée des prophètes; c'est pourquoi il « dit: Qu'il avait promis auparavant par ses prophètes dans les saintes Ecritures ». Ce genre de démonstration n'est pas sans valeur. La seconde ressort du mode de génération exprimée par ces mots : « De la race de David selon la chair », car cette naissance a été une dérogation à la loi de la nature. La troisième se tire des miracles qu'il a opérés, donnant ainsi une preuve de sa grande puissance, ainsi que l'indique ce mot : « En puissance ». La quatrième est tirée de l'Esprit-Saint qu'il a donné à ceux qui croient en lui, et par lequel il les fait tous saints ; ce que veulent dire ces paroles : « Selon l'Esprit de sanctification » car Dieu seul pouvait faire de tels dons. La cinquième est la résurrection du Seigneur : Car le Christ est le premier et le seul qui soit ressuscité par sa propre vertu : signe que le Sauveur lui-même donne comme le plus propre à fermer la bouche aux plus impudents. « Détruisez ce temple »; leur dit-il, « et je le relèverai en trois jours » (Jean, II, 19) ; « Quand vous aurez élevé le Fils de l'homme, c'est alors que vous connaîtrez ce que je suis ». (Id. VIII, 28.) Et encore : « Cette génération demande un miracle ; et il ne lui en sera point donné d'autre que celui de Jonas ». (Matth. XII, 39.) Que veut donc dire (194) « Prédestiné? » Montré, déclaré, jugé, confessé par le suffrage de tous, par les prophètes, par sa naissance inouïe selon la chair, par la puissance des miracles, par l'Esprit en qui il a donné la sanctification, par la résurrection qui a brisé la puissance de la mort.
« Par qui nous avons reçu la grâce et l'apostolat pour faire obéir à la foi (6) ». Voyez la reconnaissance du serviteur : il ne s'attribue rien, mais renvoie tout au Maître. Or le Seigneur lui-même a donné cet Esprit. Aussi disait-il : « J'ai encore bien des choses à vous dire, mais vous ne les pouvez porter à présent. Mais quand cet Esprit de vérité sera venu, il vous enseignera toute vérité ». (Jean, XVI, 12.) Et encore : « Séparez-moi Paul et Barnabé ». (Act. XIII, 2.) Et Paul nous dit dans l'Epître aux Corinthiens : « A l'un est donné par l'Esprit la parole de sagesse, à un autre la parole de science ». (I Cor. XII, 8) Et encore: « Lui-même distribue tout comme il veut ». (I Cor. XII, 11.) Prêchant aux Milésiens, il leur dit : « Dans lequel l'Esprit-Saint vous a établis pasteurs et évêques ». Voyez-vous comme il attribue au Fils ce qui est à l'Esprit, et à l'Esprit ce qui est au Fils? « La grâce et l'apostolat » ; c'est-à-dire, ce n'est pas nous qui avons mérité d'être apôtres. Ce n'est point par nos travaux et nos peines que nous avons obtenu cette dignité ; mais nous avons reçu la grâce, et ce ministère est un don d'en-haut. « Pour faire obéir à la foi ».
