Edition
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Ad uxorem
V
[1] Adiciunt quidem sibi homines causas nuptiarum de sollicitudine posteritatis et liberorum amarissima uoluptate. Nobis otiosum est. Nam quid gestiamus liberos serere, quos cum habeamus, praemittere optamus, respectu scilicet imminentium angustiarum, cupidi et ipsi iniquissimo isto saeculo eximi et recipi ad Domiuum, quod etiam apostolo uotum fuit.
Nimirum necessaria suboles seruo Dei. [2] Satis enim de salute nostra securi sumus, ut liberis uacemus. Quaerenda nobis onera sunt, quae etiam a gentilium plerisque uitantur, quae legibus coguntur, quae parricidiis expugnantur, nobis demum plurimum importuna, quantum fidei periculosa. Cur enim Dominus: Vae praegnantibus et nutricantibus, cecinit, nisi quia filiorum impedimenta testatur in illa die expeditionis incommodum futura? Ea utique nuptiis imputantur, istud autem ad uiduas non pertinebit.
[3] Ad primam angeli tubam expeditae prosilient, quamcumque pressuram persecutionemque libere perferent, nulla in utero, nulla in uberibus aestuante sarcina nuptiarum. Igitur, siue carnis, siue saeculi, siue posteritatis gratia nubitur, nihil ex istis necessitatibus competit Dei seruis, ut non satis habeam semel alicui earum succubuisse et uno matrimonio omnem concupiscentiam huiusmodi expiasse. Nubamus quotidie et nubentes a die illo timoris deprehendamur, ut Sodoma et Gomorra. [4] Nam illic non utique nuptias et mercimonia solummodo agebant, sed cum dicit; Nubebant et emebant, insigniora ipsa carnis et saeculi uitia denotat, quae a diuinis disciplinis plurimum auocent, alterum per lasciuiendi uoluptatem, alterum per adquirendi cupiditatem. Et tamen illa tunc caecitas longe a finibus saeculi habebatur. Quid ergo fiet, si quae olim detestabilia sunt penes Deum?... Ab iis nunc nos arceat! Tempus, inquit, in collecto est, superest, ut qui matrimonia habent tamquam non habentes agant.
Traduction
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À sa femme
V.
Quelques-uns, disent-ils, n'entrent dans le mariage que par le désir de revivre dans une postérité, plaisir quelquefois si amer. Cette raison n'existe pas pour nous. A quoi bon soupirer après des enfants, puisque, si nous en avons, nous souhaitons de les voir enlevés à ce siècle impie, à cause des tempêtes qui les menacent, impatients nous-mêmes d'être délivrés de ce monde prévaricateur et d'être reçus dans le royaume de Dieu, ainsi que l'Apôtre le demandait pour lui-même? Une postérité vraiment est chose nécessaire au serviteur de Dieu! Sans doute nous sommes déjà trop certains de notre salut, pour consacrer encore nos loisirs à nos enfants! Il nous faut chercher des fardeaux dont la plupart des infidèles s'affranchissent, que la loi leur impose, dont ils se débarrassent par le parricide, mais qui à nous sont aussi importuns que dangereux pour la foi! Pourquoi le Seigneur s'est-il écrié: « Malheur aux femmes enceintes ou nourrices! » sinon parce qu'il veut nous attester que des enfants seront une encombre dans ce jour où il faudra avoir les pieds libres? Cet anathème retombe sur le mariage, mais il n'atteint pas les veuves. A la première trompette de l'ange, elles s'élanceront sans obstacle. Qu'importent les persécutions et les calamités les plus violentes? elles les supporteront sans peine, parce qu'il n'y aura aucun fardeau nuptial qui tressaille dans leur sein ou s'agite à leurs mamelles.
Si donc on ne se marie que pour la chair, le siècle, ou le désir de laisser une postérité, aucune de ces prétendues nécessités ne peut convenir à un Chrétien; il lui suffit du moins d'avoir succombé une fois à l'une d'elles, et d'avoir épuisé dans un mariage unique toutes les concupiscences de cette nature. Célébrons tous les jours des noces, et nous serons surpris dans ces stériles occupations par le jour de l'épouvante, comme Sodome et Gomorrhe. Assurément, elles ne se livraient pas seulement aux noces et au trafic. Mais quand l'Ecriture dit: «Ils se mariaient et ils trafiquaient, » elle désigne les deux dérèglements les plus remarquables de la chair et du siècle, et qui nous détournent le plus des préceptes divins, l'un par les convoitises de la luxure, l'autre par le désir de posséder. Leur aveuglement toutefois avait lieu lorsque le monde ne touchait point encore à sa fin. Que faut-il donc attendre, si le Seigneur nous détourne aujourd'hui de choses qui déjà lui étaient abominables autrefois? « Le temps est court, dit l'Apôtre. Que reste-t-il à faire, sinon que ceux qui sont dans le mariage vivent comme s'ils n'étaient pas mariés? »