II.
Toutefois la naissance est annoncée formellement par Gabriel. Mais qu'importent à Marcion et l'ange du Créateur et la conception dans le sein d'une vierge? Que lui sert Isaïe, prophète du Créateur. Il hait les lenteurs, celui qui apportait des cieux un Christ improvisé. « Dérobez à mes yeux, dit-il, ces rigoureux édits de César, cette hôtellerie misérable, ces langes souillés, cette crèche incommode. Que cette multitude d'anges, occupée à honorer son maître, ne se laisse pas abuser par des illusions nocturnes! Laissez, plutôt ces bergers à leurs troupeaux; que les mages s'épargnent les fatigues. d'une si longue roule: je leur fais grâces de leurs richesses. Qu'Hérode se montre plus humain, afin qua Jérémie ne se glorifie pas de sa prédiction. Point de circoncision pour l'enfant, de peur qu'il ne gémisse. Point de présentation au temple, de peur que les frais d'une offrande ne soient onéreux pour ses parents; ne le remettez point entre les mains de Siméon, de peur qu'un vieillard prêt à mourir n'en soit centriste; enfin, imposez silence à cette prophétesse surannée, de peur qu'elle ne fascine l'enfant. » Voilà par quels conseils, sans doute, ô Marcion! tu as osé supprimer les preuves authentiques de l'humanité du Christ, pour anéantir du même coup la vérité de sa chair. Mais de quel droit, je |391 te le demande? Si tu es prophète, fais-nous quelque prédiction. Si tu es apôtre, prêche en public; si tu es homme apostolique, pense comme les apôtres; si tu n'es qu'un simple chrétien, crois ce qui nous vient de la tradition. Si tu n'es rien de tout cela, meurs, puis-je te dire avec raison; car tu es déjà mort, puisque tu as cessé d'être Chrétien, en n'admettant plus à cette foi qui constitue le Chrétien. Oui, tu es d'autant plus mort, qu'ayant été Chrétien, tu as renoncé à cette foi qui fut la tienne autrefois, comme tu l'avoues dans une de tes lettres, selon que les tiens ne le nient pas et que le prouvent les nôtres. Parce que tu as cessé de croire ce que tu as cru, tu as voulu anéantir ce que tu as cru; mais tu n'as pas réellement détruit ce que tu as cessé de croire. Non, en retranchant ce que tu as cru, tu prouves seulement qu'il y avait une autre foi avant que tu osasses la retrancher. Cette autre foi venait de la tradition. Or ce qui venait de la tradition était la foi véritable, parce qu'elle venait de ceux auxquels il appartenait de la transmettre. Ainsi, en retranchant ce qui était de tradition, tu as retranché la vérité. Tu l'as fait sans en avoir le droit. Quoique nous ayons employé plus au long ailleurs l'argument de la prescription contre toutes les hérésies, il est nécessaire de le répéter ici, comme par surcroît, pour te demander sur quelle raison tu penses que Jésus-Christ n'est pas né.
