2.
E. Je doute qu'un homme pèche, sans avoir été instruit à pécher. S'il en est ainsi, je voudrais savoir qui est celui qui nous a appris à mal faire. — A. Crois-tu que l'instruction soit un bien? — E. Qui oserait dire que l'instruction soit un mal? — A. Et si elle n'était ni bonne, ni mauvaise? — E. Pour moi je crois qu'elle est un bien. — A. Tu as parfaitement raison, c'est par elle que la science nous est donnée ou qu'elle s'éveille en nous; et personne, sans instruction, ne connaît quoi que ce soit. Es-tu d'un autre sentiment? — E. Je pense que l'instruction ne nous apprend que le bien. — A. Vois donc si on ne s'instruit pas du mal; car instruction vient d'instruire. — E. Mais si le mal ne s'apprend pas, d'où vient que les hommes le font? — A. Cela vient peut-être de ce qu'ils se détournent de l'instruction et qu'ils y deviennent étrangers; mais que telle soit la vraie raison, ou qu'il yen ait une autre, peu importe. Puisque l'instruction est un bien, et que le mot lui-même ne signifie pas autre chose que apprendre, il demeure acquis manifestement que le mal ne peut s'apprendre. Car s'il s'apprenait, il serait contenu dans l'instruction, et alors l'instruction ne serait plus un bien; mais elle est un bien, tu l'as admis toi-même. Le mal ne s'apprend donc pas, et c'est en vain que tu cherches un maître qui nous aurait appris à le commettre. Ou bien, si on nous l'apprend, c'est pour nous enseigner à l'éviter, et non pas à le faire; et il s'ensuit que faire le mal n'est rien autre chose que renoncer à l'instruction. 1
-
Se rappeler la doctrine de saint Augustin dans le livre du Maître. ↩
