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La cité de dieu
CHAPITRE II.
IL EST SANS EXEMPLE DANS LES GUERRES ANTÉREURES QUE LES VAINQUEURS AIENT ÉPARGNÉ LE VAINCU PAR RESPECT POUR LES DIEUX.
On a écrit l’histoire d’un grand nombre de guerres qui se sont faites avant la fondation de Rome et depuis son origine et ses conquêtes; eh bien! qu’on en trouve une seule où les ennemis, après la prise d’une ville, aient épargné ceux qui avaient cherché un refuge dans le temple de leurs dieux1! qu’on cite un seul chef des barbares qui ait ordonné à ses soldats de ne frapper aucun homme réfugié dans tel ou tel lieu sacré! Enée ne vit-il pas Priam traîné au pied des autels et « Souillant de son sang les autels et les feux qu’il avait lui-même consacrés2? »
Est-ce que Diomède et Ulysse, après avoir massacré les gardiens de la citadelle, n’osèrent pas
« Saisir l’effigie sacrée de Pallas, et de leurs mains ensanglantées profaner les bandelettes virginales de la déesse? »
Ce qu’ajoute Virgile n’est pas vrai:
« Dès ce moment disparut sans retour l’espérance des Grecs3
C’est depuis lors, en effet, qu’ils furent vainqueurs; c’est depuis lors qu’ils détruisirent Troie par le fer et par le feu; c’est depuis lors qu’ils égorgèrent Priam abrité près des autels. La perte de Minerve ne fut donc pas la cause de la chute de Troie. Minerve elle-même, pour périr, n’avait-elle rien perdu? Elle avait, dira-t-on, perdu ses gardes. Il est vrai, c’est après le massacre de ses gardes qu’elle fut enlevée par les grecs. Preuve évidente que ce n’étaient pas les Troyens qui étaient protégés par la statue, mais la statue qui était protégée par les Troyens. Comment donc l’adorait-on pour qu’elle fût la sauvegarde de Troie et de ses enfants, elle qui n’a pas su défendre ses défenseurs?
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Les bénédictins citent deux exemples qui atténuent, sans la contredire, la remarque de saint Augustin l’exemple d’Agésilas, après la victoire de Coronée, et celui d’Alexandre, qui, à la prise de Tyr, fit grâce à toue ceux qui s’étaient réfugiés dans te temple d’Hercule. Voyez Plutarque, Vie d’Agésilas, ch. 19; et Arrien, De reb. gest. Alex., lib. n, cap. 24, ↩
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Enéide, liv. II, vers 501, 502 ↩
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Enéide, liv. II, vers 166-170. ↩
Edition
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De civitate Dei (CCSL)
Caput II: Quod nulla umquam bella ita gesta sint, ut uictores propter deos eorum, quos uicerunt, parcerent uictis.
Tot bella gesta conscripta sunt uel ante conditam Romam uel ab eius exortu et imperio: legant et proferant sic ab alienigenis aliquam captam esse ciuitatem, ut hostes, qui ceperant, parcerent eis, quos ad deorum suorum templa confugisse compererant, aut aliquem ducem barbarorum praecepisse, ut inrupto oppido nullus feriretur, qui in illo uel illo templo fuisset inuentus. nonne uidit Aeneas Priamum per aras sanguine foedantem quos ipse sacrauerat ignes? nonne Diomedes et Vlixes caesis summae custodibus arcis corripuere sacram effigiem manibusque cruentis uirgineas ausi diuae contingere uittas? nec tamen quod sequitur uerum est: ex illo fluere ac retro sublapsa referri spes Danaum. postea quippe uicerunt, postea Troiam ferro ignibusque deleuerunt, postea confugientem ad aram Priamum obtruncauerunt. nec ideo Troia periit, quia Mineruam perdidit. quid enim prius ipsa Minerua perdiderat, ut periret? an forte custodes suos? hoc sane uerum est; illis quippe interemptis potuit auferri. neque enim homines a simulacro, sed simulacrum ab hominibus seruabatur. quomodo ergo colebatur, ut patriam custodiret et ciues, quae suos non ualuit custodire custodes?