Edition
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Vita Sancti Martini
1.
(1) Plerique mortales studio et gloriae saeculari inaniter deditiio exinde perennem, ut putabant, memoriam nominis sui quaesierunt, si uitas clarorum uirorum stilo inlustrassent. (2) Quae res utique non perennem quidem, sed aliquantulum tamen conceptae spei fructum adferebat, quia et suam memoriam, licet incassum, propagabant, et propositis magnorum uirorum exemplis non parua aemulatio legentibus excitabatur. Sed tamen nihil ad beatam illam aeternamque uitam haec eorum cura pertinuit. (3) Quid enim aut ipsis occasura cum saeculo scriptorum suorum gloria profuit? Aut quid posteritas emolumenti tulit legendo Hectorem pugnantem aut Socraten philosophantem? Cum eos non solum imitari stultitia sit, sed non acerrime etiam inpugnare dementia: quippe qui humanam uitam praesentibus tantum actibus aestimantes spes suas fabulis, animas sepulcris dederint: (4) siquidem ad solam hominum memoriam se perpetuandos crediderunt, cum hominis officium sit, perennem potius uitam quam perennem memoriam quaerere, non scribendo aut pugnando uel philosophando, sed pie sancte religioseque uiuendo. (5) Qui quidem error humanus litteris traditus in tantum ualuit, ut multos plane aemulos uel inanis philosophiae uel stultae illius uirtutis inuenerit. (6) Unde facturus mihi operae pretium uideor, si uitam sanctissimi uiri, exemplo aliis mox futuram, perscripsero: quo utique ad ueram sapientiam et caelestem militiam diuinamque uirtutem legentes incitabuntur. In quo ita nostri quoque rationem commodi ducimus,ut non inanem ab hominibus memoriam, sed aeternum a Deo praemium exspectemus, quia etsi ipsi non ita uiximus, ut exemplo aliis esse possimus, dedimus tamen operam, ne is lateret qui esset imitandus. (7) Igitur sancti Martini uitam scribere exordiar, ut se uel ante episcopatum uel in episcopatu gesserit, quamuis nequaquam ad omnia illius potuerim peruenire: adeo ea, in quibus ipse tantum sibi conscius fuit, nesciuntur, quia laudem ab hominibus non requirens, quantum in ipso fuit, omnes uirtutes suas latere uoluisset. (8) Quamquam etiam ex his, quae conperta nobis erant, plura omisimus, quia sufficere credidimus, si tantum excellentia notarentnr: simul et legentibus consulendum fuit, ne quod his pareret copia congesta fastidium. (9) Obsecro autem eos qui lecturi sunt, ut fidem dictis adhibeant, neque me quicquam nisi conpertum et probatum scripsisse arbitrentur: alioquin tacere quam falsa dicere maluissem.
Traduction
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Vie de Saint Martin
I.
--- La plupart de ceux qui ont écrit la vie des hommes illustres, exclusivement occupés de la poursuite d'une gloire toute mondaine, ont espéré par là s'immortaliser. Sans avoir complètement réussi, ils ont atteint leur but en partie ; car, tout en acquérant une vaine renommée, les beaux exemples qu'ils racontaient de ces hommes remarquables excitaient une grande émulation parmi leurs lecteurs. Mais ce soin qu'ils prenaient de la gloire de leurs héros, n'avait point pour butta bienheureuse et éternelle vie. Car, à quoi leur a servi cette gloire qui doit périr avec leurs écrits, et quel avantagea retiré la postérité de la lecture des combats d'Hector ou des disputes philosophiques de Socrate, puisque c'est une folie de les imiter, et même de ne pas les combattre avec énergie ? Ne considérant dans la vie que le présent, ils se sont nourris de mensonges, et ont enfermé leurs âmes dans la nuit du tombeau. Ils ont pensé seulement à s'immortaliser dans la mémoire des hommes, tandis que tout homme doit plutôt travailler à acquérir la vie éternelle qu'à perpétuer sa mémoire sur cette terre, non par des écrits, des luttes ou des disputes philosophiques, mais en menant une vie pieuse et sainte. Cette erreur, transmise d'âge en âge par les écrits des littérateurs, a tellement prévalu, qu'il s'est rencontré beaucoup de partisans de cette philosophie insensée et de ce vain mérite. Je crois donc avoir fait quelque chose d'utile en écrivant la vie de ce saint homme ; elle servira d'exemple à mes lecteurs, et les excitera à acquérir la véritable sagesse, à combattre pour le ciel, et à mériter la force d'en haut. En cela, je trouve aussi mon intérêt, espérant obtenir de Dieu une récompense et non des hommes un vain souvenir ; car, si je n'ai pas vécu de manière à être proposé aux autres comme un modèle, je me suis du moins appliqué à faire connaître celui qui mérite cet honneur. Je vais donc commencer à écrire la vie de saint Martin, et à dire comment il s'est conduit, soit avant, soit pendant son épiscopat, bien que je ne sois pas parvenu à connaître toutes les particularités de sa vie et les faits dont il là le seul témoin, puisque, ne cherchant pas la gloire qui vient des hommes, il s'efforça toujours de tenir ses vertus cachées. J'ai même omis quelques-uns des faits que je connaissais, persuadé qu'il était suffisant de parler des plus remarquables, et que pour mes lecteurs trop de matières causerait peut-être de l'ennui. Je supplie ceux qui me liront d'ajouter foi à mes récits, et d'être convaincus que je n'ai écrit que des faits certains et avérés ; d'ailleurs, mieux vaut se taire que de mentir.