Edition
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De resurrectione carnis
II.
[1] Si vero et apud deum aliqua secta est Epicureis magis adfinis quam prophetis, sciemus quid audiant a Christo Sadducaei. Christo enim servabatur omnia retro occulta nudare, dubitata dirigere, praelibata supplere, praedicata repraesentare, mortuorum certe resurrectionem non modo per semetipsum verum etiam in semetipso probare. [2] Nunc autem ad alios Sadducaeos praeparamur, partiarios sententiae illorum: dimidiam agnoscunt resurrectionem, solius scilicet animae, ita aspernati carnem sicut et ipsum dominum carnis. Nulli denique alii salutem corporali substantiae invident quam alterius divinitatis haeretici. [3] Ideoque et Christum aliter disponere coacti, ne creatoris habeatur, in ipsa prius carne eius erraverunt, aut nullius veritatis contendentes eam secundum Marcionem et Basiliden, aut propriae qualitatis secundum heredes Valentini et Apellen. [4] Atque ita sequitur ut salutem eius substantiae excludant cuius Christum consortem negant, certi illam summo praeiudicio resurrectionis instructam si iam in Christo resurrexerit caro. [5] Propterea et nos volumen praemisimus de carne Christi, quo eam et solidam probamus adversum phantasmatis vanitatem et humanam vindicamus adversus qualitatis proprietatem, cuius condicio Christum et hominem et filium hominis inscripserit. [6] Carneum enim atque corporeum probantes eum, proinde et obducimus praescribendo nullum alium credendum deum praeter creatorem, dum talem ostendimus Christum in quo dinoscitur deus, qualis promittitur a creatore. Obducti dehinc de deo carnis auctore et de Christo carnis redemptore, iam et de resurrectione carnis revincentur, congruente scilicet et deo carnis auctori et Christo carnis redemptori. [7] Hoc ferme modo dicimus ineundam cum haereticis disceptationem: nam et ordo semper a principalibus deduci exposcit, ut de ipso prius constet a quo dicatur dispositum esse quod quaeritur. [8] Atque adeo et haeretici ex conscientia infirmitatis nunquam ordinarie tractant. Certi enim quam laborent in alterius divinitatis insinuatione adversum deum mundi omnibus naturaliter notum de testimoniis operum, certe et in sacramentis priorem et in praedicationibus manifestatiorem, sub obtentu quasi urgentioris causae, id est ipsius humanae salutis ante omnia requirendae, a quaestionibus resurrectionis incipiunt, quia durius creditur resurrectio carnis quam una divinitas. [9] Atque ita tractatum viribus ordinis sui destitutum et scrupulis potius oneratum depretiantibus carnem paulatim ad alterius divinitatis temperant sensum ex ipsa spei concussione et demutatione. [10] Deiectus enim unusquisque vel motus de gradu eius spei quam susceperat apud creatorem, facile iam declinatur ad alterius spei auctorem etiam ultro suspicandum: per diversitatem enim promissionum diversitas insinuatur deorum. Sic multos inretitos videmus, dum ante de resurrectione carnis eliduntur quam de unione divinitatis elidunt. [11] Igitur quantum ad haereticos demonstravimus quo cuneo
Traduction
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De la résurrection de la chair
II.
S'il y a, même chez le Dieu véritable, quelque secte plus voisine des Epicuriens que des Prophètes, nous saurons bientôt quelle réponse le Christ donne aux Sadducéens. A Jésus-Christ était réservé de lever les voiles, de fixer les incertitudes, d'achever les connaissances imparfaites, de réaliser les figures, enfin de prouver la résurrection des morts, non-seulement par lui-même, mais dans lui-même.
Armons-nous maintenant contre d'autres Sadducéens qui partagent leurs doctrines. Ils ne reconnaissent qu'une demi-résurrection, la résurrection de l'âme, pleins de mépris d'ailleurs pour la chair et pour le Créateur de la chair lui-même. Enfin, les hérétiques, qui ont inventé une autre divinité, sont les seuls qui refusent à la substance corporelle la résurrection. Aussi, réduits à changer la nature du Christ, de peur qu'il ne passât pour le Créateur de la chair, commencèrent-ils par se tromper sur sa chair, les uns prétendant avec Marcion et Basilide qu'elle n'était pas véritable, les autres affirmant avec les hérésies d'Apelles et de Valentin, qu'elle avait des propriétés particulières. Il suit de là qu'ils excluent du salut la substance à laquelle ils nient que le Christ ait pris part, certains qu'il naît en sa faveur un légitime préjugé de résurrection, si la chair est déjà ressuscitée dans le Christ. Voilà pourquoi nous avons déjà écrit un traité sur la Chair de Jésus-Christ, où nous prouvons, contre la chimère d'un fantôme, qu'elle est solide, contre la supposition de propriétés distinctives, qu'elle est semblable à la nôtre: d'où il résulte que Jésus-Christ est homme et fils de l'homme. En effet, démontrer qu'il avait une chair et un corps réels, |437 c'est conclure, en opposant aux hérétiques une fin de non recevoir, qu'il n'y a pas d'autre Dieu que le Dieu créateur, puisque nous montrons que le Christ, dans lequel se reconnaît le Dieu, est tel que l'a promis le Créateur, Une fois qu'ils seront convaincus que Dieu est le Créateur de la chair, et le Christ le Rédempteur de la char, ils seront amenés à reconnaître la résurrection de la chair. La raison le demande, et ainsi faut-il presque toujours procéder avec les sectaires. L'ordre veut que l'on commence par le point le plus important, afin que l'on soit bien d'accord sur le principe fondamental de l'objet contesté. Aussi les hérétiques, qui ont le sentiment de leur faiblesse, ne suivent-ils jamais celle méthode. Certains que leurs tentatives pour introduire une autre Divinité sont vaines, en face du Dieu de l'univers que nous connaissons tout naturellement par le témoignage de ses oeuvres, qui a indubitablement la priorité dans ses mystères, et se manifeste par des prophéties; alors, sous le prétexte de résoudre une difficulté plus pressante, c'est-à-dire de rechercher avant tout quel est le salut de l'homme, ils commencent par les questions de la résurrection. Ils savent bien qu'il est plus difficile de croire à la résurrection de la chair qu'à une divinité unique. Puis, lorsqu'ils ont interverti l'ordre de la discussion, qu'ils embarrassent encore de leurs dédains pour la chair, ils insinuent peu à peu leur divinité étrangère sur l'ébranlement et la ruine de notre espérance. En effet, une fois que l'homme est déchu ou éloigné de cette confiance qu'il plaçait dans son Créateur, il est attiré aisément vers l'auteur d'une autre espérance, ou plutôt, il s'y porte de lui-même. C'est par la diversité des promesses que l'on inculque la diversité des dieux. Ainsi avons-nous vu plusieurs fidèles pris au piège, parce qu'ils se laissent battre sur la résurrection de la chair, avant d'avoir vaincu l'ennemi sur l'unité de Dieu. Quant aux hérétiques, nous avons donc démontré avec |438 quelle arme nous devions les repousser; déjà même nous les avons combattus chacun dans un traité spécial, sur l'unité de Dieu et sur son Christ, contre Marcion; sur la chair du Seigneur, contre quatre hérésies, pour poser d'avance les fondements de la question présente, de sorte qu'il ne nous reste plus maintenant qu'à discuter la résurrection de la chair, comme un dogme incertain pour nous, mais assuré à l'égard du Créateur. Beaucoup, en effet, sont dans l'ignorance; d'autres n'ont qu'une foi peu éclairée et chancelante; le plus grand nombre demande à être instruit, dirigé, soutenu. Par là nous ne ferons que les affermir davantage dans l'unité de Dieu: vérité qui résiste ou s'ébranle suivant que l'on nie ou que l'on admet la résurrection de la chair. Je ne crois pas qu'il soit besoin de traiter du salut de l'âme. Les hérétiques, quelle que soit leur manière de le concevoir, ne le nient pas cependant. Peu nous importe qu'un Lucain1, sans épargner même cette substance, en admette la dissolution avec Aristote, et lui substitue un autre je ne sais quoi, comme si on devait voir ressusciter une troisième substance qui ne sera ni chair, ni âme, ni homme conséquemment, mais quelque ours2 de la Lucanie peut-être. Nous avons traité longuement de toutes les qualités de l'âme dans un livre spécial, où la déclarant d'abord immortelle, nous reconnaissons que la chair seule tombe en dissolution, mais pour se relever infailliblement' nous avons même rassemblé dans ce corps d'ouvrage toutes les questions que nous n'avions qu'effleurées ailleurs, à cause de la rapidité du sujet: car il est souvent à propos ou d'effleurer les choses ou de les ajourner, pourvu que l'on complète les unes dans le traité qui leur appartient, ou que l'on acquitte les promesses des autres. |439